Stockage de données & écologie : comment lutter contre la pollution numérique à l’ère du big data ?

Stockage de données & écologie : comment lutter contre la pollution numérique à l’ère du big data ?

L’écologie et les nouvelles technologies ont souvent été des sujets opposés, à cause de la pollution que génèrent la fabrication des appareils en usine, leur utilisation quotidienne qui a un impact sur la consommation électrique (recharge de batteries, consommables etc), et le recyclage des déchets que ces appareils high tech occasionnent. Nous allons tenter de comprendre l’origine de cette pollution numérique et les solutions envisagées.

Le digital est énergivore et consomme 10% de l’électricité produite dans le monde

Ce n’est plus une surprise pour personne, le secteur du numérique est un grand consommateur d’énergie. Encore plus depuis l’ère de la big data. Pourquoi ? Le numérique repose principalement sur la data produite et consommée par ses utilisateurs, et les exemples sont nombreux :

  • les milliards d’heures de vidéos enregistrées et mises en ligne sur des plate-formes de streaming (Youtube, Twitch etc…);
  • les milliards de contenus (photos, vidéos, textes) publiés sur les réseaux sociaux en continu et chaque jour (Facebook, Instagram, Twitter…);
  • les milliards d’heures de visioconférences dont les données transitent à travers des serveurs pour être restitués à l’autre bout du monde aux utilisateurs;
  • les bases de données gigantesques des GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft), stockées en ligne dans le cloud, et mise à disposition de leurs utilisateurs pour leur utilisation quotidienne (boite mails, stockage de fichier, photos, vidéos…)
  • les data centers éparpillés partout dans le monde, qui sauvegardent tout le numérique : les factures d’achats, les dossiers des patients des hôpitaux, les services et flux financiers entre banques et institutions etc.

Pour donner un exemple concret et infime, afin de matérialiser ce dont on parle, rappelez-vous de la vidéo Gangnam Style du chanteur coréen, sortie en 2012, et qui a généré plus de 3,4 milliards de visionnages sur Youtube : en matière de demande d’électricité, c’est l’équivalent de la consommation annuelle d’une petite centrale électrique !

Plus largement, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) publiait en 2018 un article intitulé « Numérique : le grand gâchis énergétique » (voir ici : https://lejournal.cnrs.fr/articles/numerique-le-grand-gachis-energetique) dans lequel les ressources numériques (ordinateurs, data centers…) consomment 10% de l’électricité produite dans le monde !

Un autre exemple éloquent, c’est l’usage de l’e-mail : un mail contenant une pièce jointe et pesant au total 1 Mo (1 mégaoctet), et si l’on prend en compte son cycle de vie complet, équivaudrait à la consommation d’une ampoule électrique de 60 watts durant 25 minutes (soit l’émission de 20g de CO2).

Et enfin, un dernier exemple de la vie de tous les jours, qui parlera au plus grand nombre, c’est le fonctionnement d’une box Internet : elles fonctionnent toutes 24/7, et la plupart des modèles commercialisés par les fournisseurs d’accès à Internet n’ont aucun bouton marche / arrêt… il faut donc débrancher la prise le soir et la rallumer le matin pour réaliser des économies d’énergie. Ces box Internet consomment à elles-seules 1% de l’électricité en France.

Digitalisation de la société, hyper-croissance des utilisateurs, applications gourmandes en data… comment en-est on arrivé là ?

On a d’un côté un marché, avec des consommateurs de plus en plus enclin à l’usage du numérique dans leur quotidien, une fracture du numérique qui se réduit au fil des années, et de l’autre des groupes, entreprises, gouvernements et autres acteurs qui proposent de plus en plus de services numériques pour faciliter la vie des utilisateurs, et gagner en productivité.

Au delà de cette croissance organique du marché du numérique, il y a un enjeu de fond qui a énormément accéléré cette surconsommation d’énergie : l’instantanéité. Nous avons une société qui souhaite tout avoir en immédiat, sans délai de latence, sans temps de chargement long ou superflu. Ainsi, les infrastructures IT, que ce soit l’hébergement des sites web, les serveurs stockant les applications, les vidéos et photos… toutes, sans exception, ont été surdimensionnées d’un point de vue technique, afin de pouvoir servir ces données au plus grand nombre en un temps record, absorber les pics de demande sans baisser en qualité de service.

Pour faire simple, le numérique nous a apporté une rapidité et un confort dans de nombreux services au quotidien, dont nous sommes devenus dépendants, et surtout elle nous a habitué et éduqué à de l’immédiateté, éliminant par la même occasion notre patience à attendre. Il suffit de le constater au quotidien : quand une application mobile met du temps à charger, on la ferme immédiatement. Quand une page d’un site web se charge en plus de 3 secondes, on la quitte aussitôt. Et tout cela, pour les entreprises, c’est une perte potentielle de chiffre d’affaires qui les ont mené à sur-optimiser l’accès à leur service, afin de ne jamais ralentir la cadence, ni créer de déception chez le consommateur.

Quelles solutions pour réduire l’empreinte écologique du numérique ?

Depuis des années, les fabricants de matériel informatique et plus globalement high tech ont fourni de nombreux efforts pour réduire la consommation d’énergie de leurs usines, et surtout de rendre moins énergivores leurs appareils. Les smartphones, tablettes, PC portables ont connu de nombreuses innovations qui ont permis l’augmentation de leur autonomie grâce à des batteries plus performantes ou encore une optimisation de la consommation d’énergie grâce à des systèmes d’exploitations plus intelligent.

Si on regarde plus largement, on retrouve également les infrastructures comme les data-centers ayant adopté une approche Green IT, qui optimisent leur consommation d’énergie, utilisent des serveurs moins énergivores, améliorent leur système de refroidissement des salles de données, exploitent des technologies de stockage comme le SDD qui consomment moins d’énergies que les disques durs traditionnels. Bref, des efforts sont effectués d’un point de vue macro, mais ont l’effet d’un coup d’épée dans l’eau face à la croissance gigantesque d’utilisateurs et de consommation de données.

Réconcilier numérique et développement durable dépendra des utilisateurs

En réalité, le changement ne pourra provenir que du changement de comportement des utilisateurs eux-même. Que ce soit dans le BtoB ou le BtoC, les exigences accrues des utilisateurs, leurs habitudes de consommations ont dicté les normes de l’industrie du numérique, et ont forcé tous les acteurs à s’aligner sur des standards élevés. Espaces de stockage quasi-illimités, fichiers volumineux stockés sans être compressés etc.

Concrètement, utilisateurs qu’ils soient des particuliers ou en entreprises peuvent jouer un rôle moteur dans cette mutation vers une économie numérique verte, en adoptant des réflexes au quotidien.

Voici une liste non exhaustive pour utiliser le numérique de façon plus écologique :

  • messageries e-mail : réduire au maximum leur usage en supprimant les e-mails inutiles (notamment les plus volumineux), en nettoyant ses dossiers indésirables régulièrement, en allégeant la signature des e-mails… l’objectif est de réduire au maximum l’espace de stockage occasionné par sa messagerie;
  • gestion des fichiers : supprimer les fichiers en doublons stockés sur les serveurs, compresser systématiquement tout fichier volumineux avant son stockage (via les compresseurs de fichiers comme Winrar, Winzip etc), effacer les fichiers obsolètes ou trop anciens et n’ayant plus d’utilité pour vous ou votre entreprise;
  • usage du smartphone : de nombreux éléments constituent une source de consommation importante d’énergie dans un mobile comme la luminosité de l’écran, les applications non utilisées qui tournent en tâche de fond, la connexion Wifi et bluetooth qui recherche constamment des périphériques compatibles aux alentours… ou tout simplement éteindre son mobile quand on en a pas réellement l’utilité, notamment la nuit – la plupart des smartphones maintiennent la fonction de réveil même éteint donc pas d’excuse de louper son réveil;
  • box Internet : le meilleur réflexe pour l’écologie et le portefeuille reste d’éteindre votre box Internet le soir, à ce titre vous pouvez opter pour une prise avec minuteur programmé, qui éteindra puis rallumera votre Box internet à une certaine heure de façon automatique;
  • infrastructures IT et serveurs d’entreprise : réviser annuellement son parc informatique, et ne garder que ce qui est réellement nécessaire est l’une des meilleures manières de réduire son empreinte carbone, en effet de nombreuses entreprises disposent de plusieurs serveurs maintenus sans réellement d’utilité, ou encore des ordinateurs branchés et en veille sans jamais être éteint, alors qu’il suffirait de sensibiliser les collaborateurs à ces gestes simples et écologiques

Tous ces gestes, comportements, multipliés par le nombre d’utilisateurs qui les effectueront peuvent changer la donne, et permettre de ralentir la course à l’équipement, puisque les entreprises n’auront pas à surdimensionner leur parc de serveurs pour accueillir toutes ces données car elles prendront moins de place par utilisateur. Bien évidemment, il existe d’autres industries concernées par ce gaspillage à grande échelle, comme cette étude qui nous apprend que 50 millions de tonnes de déchets électroménagers sont générés chaque année, alors que beaucoup de ces appareils pourraient connaître une seconde vie en étant réparé.

Pour aller plus loin sur le numérique et l’écologie, nous vous conseillons de consulter le site EcoInfo, projet porté par des ingénieurs, chercheurs et étudiants des secteurs de la recherche et de l’enseignement supérieur en France autour d’un objectif commun : agir pour réduire les impacts (négatifs) environnementaux et sociétaux des technologies de l’information et la communication. Pour en savoir plus : https://ecoinfo.cnrs.fr/


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